Les Litiges Employeur-Salarié en Chine : se Préparer pour des Négociations Agressives et des Concessions Difficiles DEUXIEME PARTIE
Écrit par : Dezan Shira & Associates
Traduit par : Linh Tran Huy
Dans notre première partie, nous avons détaillé les raisons dites « légitimes » de résiliation et les pressions exercées dans le système de règlement des litiges en Chine où les compromis se font plus que communs.
Alors que la Chine est en train de subir une transformation économique et passe d’une économie axée sur l’investissement, la fabrication et l’export à une économie plus basée sur la consommation intérieure, la restructuration de la main d’œuvre et les déplacements seront des composantes naturelles d’un nouveau modèle.
Il est désormais impératif pour les investisseurs étrangers de comprendre et maîtriser le droit du travail chinois. Il est essentiel de trouver et de retenir des spécialistes du droit du travail chinois afin d’aider votre entreprise à se préparer afin de répondre aux différends susceptibles de se présenter.
Styles de négociation agressifs et de mauvaise foi
Les tribunaux américains ou européens ont tendance à rendre publics leurs documents et leurs décisions. Cela semble logique : il est estimé que la médiatisation d’actes répréhensibles aurait un effet dissuasif. En Chine, les avocats trouveront beaucoup moins de cas publics disponibles, et une des raisons est qu’un accord négocié est favorisé et que les décisions formelles sont moins fréquentes dans de tels cas.
Compte tenu du fait que chaque partie ne s’attend pas à ce qu’une affaire soit soldée par un jugement formel avec un vainqueur et un perdant clair et ne s’attend pas à une divulgation du différend au public, cette procédure confidentielle pourrait mener à une agressivité accrue ou à une mauvaise foi notable.
Les parties pourraient être moins incitées à négocier de bonne foi, et être amenées à penser qu’il y aurait plus à gagner à travers une négociation agressive. Mais quels sont les exemples de comportements dits « agressifs » utilisés pour améliorer sa position ?
Menaces de divulgation de non-conformité présumée
Bien que tous les employeurs connaissent les cas où les salariés menacent de les traîner en justice suite à leur résiliation, ces menaces en Chine peuvent également être accompagnées d’une menace de divulgation des activités potentiellement illégales ou subversives de l’entreprise. En d’autres termes, l’employé mécontent menace d’intenter une action en justice lors de l’arbitrage et de signaler un non-respect présumé des normes aux autorités dans l’espoir d’inculquer la peur d’une enquête réglementaire chez l’autre partie.
Les employés mécontents peuvent considérer cette tactique comme un bon pari pour secouer l’équipe de négociation de l’entreprise. Cela peut mettre l’employé dans une position de force pour un règlement rapide et lucratif qui, bien sûr, achètera la coopération et le silence de l’employé.
Il revient aux entreprises de déterminer si la menace est en effet sérieuse. La plupart des employés n’utiliseront vraisemblablement la menace qu’en tant qu’outil de négociation et non dans le but d’apporter des ennuis à l’entreprise (le deuxième cas pouvant se révéler contre-productif).
Vol de sceaux
Les employeurs étrangers ne connaissent peut-être pas cette une autre tactique particulière à la Chine (et à d’autres pays d’Asie) : le vol des sceaux de l’entreprise comme levier de négociations. Il s’agit d’une tactique osée et perturbatrice généralement possible uniquement pour les cadres supérieurs, qui sont normalement les seuls employés ayant accès aux sceaux et pouvant ainsi les saisir pour un effet de levier, en particulier dans une entreprise avec des systèmes de contrôle interne faibles.
Les sceaux étant nécessaires au fonctionnement quotidien des entreprises, leur perte peut entraîner un arrêt ou un retard considérable des opérations en cours et ainsi mettre les négociateurs en difficulté.
Le règlement qui en résulte est normalement le suivant : l’employé renvoie les sceaux en échange d’une indemnité de départ de la part de l’employeur. Il est peu probable que des hommes ou femmes d’affaires en Chine n’aient pas entendu parler de situations malheureuses où de l’argent a été transmis à un ancien employé en échange des sceaux.
En dehors des sceaux, les principaux documents d’entreprise, les dossiers financiers, les ordinateurs, les mots de passe ou les clés peuvent également être saisis comme outil de négociation. Il va sans dire que le vol de sceaux et de documents d’entreprise par un employé mécontent est illégal. Cependant, en pratique, force est de constater qu’il existe peu de cas où les employés en question sont tenus responsables ou doivent rendre compte de leurs actions pour cette bravade. Au contraire, c’est ainsi qu’ils parviennent à améliorer leur position de négociation et à produire des indemnités de licenciement plus importantes.
Dans certains cas où les autorités sont consultées, la police peut rédiger un rapport mais peut être réticente à s’impliquer, en rejetant parfois l’affaire comme un simple différend employeur-salarié. Par conséquent, la tactique reste de saisir les sceaux et/ou d’autres actifs clés afin de faire pression et de continuer dans sa lancée.
Se préparer pour le règlement des différends
Sur le plan pratique, les employeurs devraient envoyer tous les règlements et règles internes de l’entreprise tels que le manuel de l’employé aux salariés (y compris les cadres supérieurs) le plus tôt possible pour s’assurer de leur reconnaissance. Les employeurs devraient documenter ce processus, obtenir des dossiers signés auprès des employés et conserver les documents pour référence ultérieure, conformément aux exigences en matière de preuve. Le maintien de ces enregistrements permettra à une entreprise de présenter des arguments solides au médiateur ou à l’arbitre et ainsi de renforcer sa position dans le litige.
De même, les entreprises devraient créer des systèmes de contrôles internes qui documentent clairement l’examen et l’approbation des décisions par les managers concernés. Encore une fois, les employeurs devraient rédiger ces documents conformément aux exigences en matière de preuve, comme conseillé par des experts en litige de travail. Cette méthode de « contrôle » devrait être appliquée aux cadres supérieurs tout comme aux salariés normaux (un manquement malheureusement souvent constaté dans les contrôles internes en Chine). Les employeurs ne doivent pas négliger l’importance d’une telle tâche.
Étant donné que les cadres supérieurs présentent le plus grand risque de perte substantielle, les employeurs devraient mettre en place des systèmes de rétention d’informations qui devraient couvrir tous les cadres. De tels systèmes permettraient une documentation – information sur l’expéditeur, les destinataires, ainsi que tous les transferts de fichiers – des employés, conformément aux normes en matière de preuve, comme conseillé par des experts en arbitrage du travail. Il existe souvent des documents importants qui mettent en lumière les actes répréhensibles des cadres supérieurs. Cependant, si ces enregistrements ne peuvent être consultés et présentés aux médiateurs ou aux arbitres, la position de négociation de l’entreprise s’en trouvera considérablement affaiblie.
Prévenir les litiges dans la mesure du possible
C’est une question souvent délicate et difficile à mettre en œuvre. Beaucoup d’employeurs éprouvent des difficultés à reprocher aux cadres supérieurs chinois d’avoir omis de respecter les contrôles internes à la lettre, en particulier si l’organisation ne dispose pas d’une forte culture de conformité. Les managers chinois les plus compétents et expérimentés pourraient s’offusquer de l’application universelle de ces normes tant aux cadres supérieurs qu’aux employés lambda.
Si litige il y a, il revient aux employeurs de prendre des mesures préventives pour documenter l’activité de leurs employés d’une manière compatible avec les normes de conduite. Réitérons que cela est un sujet sensible : des managers réalisant que leurs communications et actions sont documentées se mettront très certainement sur la défensive, ce qui risque de détériorer la situation.
Comme mentionné plus haut, il n’est pas rare que les employés prédisent un litige et prennent leurs propres actions préventives. Si l’employé y a accès, il peut s’efforcer d’obtenir des documents corporatifs sensibles ou des sceaux d’entreprise comme instrument de négociation.
Cependant, les employeurs qui disposent d’un contrôle interne et d’une administration RH forts peuvent atténuer les risques de conflits du travail et les comportements agressifs parfois associés à leur règlement.
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